Philippe Bourguignon

Philippe Bourguignon: les souvenirs d’un sommelier à mots choisis

Crédits: par Virginie Valadas in Le phare de Ré

 

Philippe Bourguignon a une longue et riche expérience de sommelier et une très grande passion pour les vins, et surtout pour les vignerons, les cavistes, tous ceux qui, comme lui, honorent ce nectar. En septembre, il a sorti chez Glénat Sommelier : à mots choisis où il partage sa vision de l’univers du vin ainsi que quelques anecdotes.

Philippe Bourguignon le bien nommé, partage sa vie entre la Seine-et-Marne et l’île de Ré, où il possède une maison au Bois-Plage. Il a longtemps été chef sommelier puis directeur général de Laurent, l’une des tables les plus prestigieuses de Paris où il a côtoyé de grands artistes, mais aussi d’éminents hommes politiques, dont les quatre derniers présidents de la République française. Ce qui anime Philippe Bourguignon, c’est bien sûr la passion du vin et de l’univers qu’il y a autour. Mais c’est surtout l’amour de ceux qui font le vin: les vignerons, les cavistes, mais aussi les aubergistes, les bistrotiers, tout autant que les éminents œnologues.
Quand il séjourne dans sa résidence secondaire du Bois-Plage auprès de son épouse, il n’aime rien tant qu’aller passer du temps avec Pierrot, ancien vigneron coopérateur qui, aujourd’hui encore, au fond de son improbable chai, tire quelques bouteilles de vin dans un capharnaüm à nul autre pareil.
Ce qui fascine Philippe, c’est la magie qui s’opère ici, dans le silence au fond d’une venelle du Bois-Plage. Et aussi la rencontre avec l’homme de vigne, de terroir. Puisqu’ils ont un point commun : la passion du vin.
Rencontrer Philippe Bourguignon, c’est l’assurance de moment de partage autour de la dégustation de délicieux nectars et de l’évocation de quelques souvenirs tout aussi savoureux. C’est ce qu’il a souhaité partager avec les lecteurs à travers cet ouvrage : Sommelier : à mots choisis, où il nous emmène en balade, dans l’univers feutré des grands restaurants gastronomiques ou celui plus populaire de certaines caves ou bistrots de Montmartre. Là où l’on remplissait les barriques le jour, avant de les vider à la nuit venue.Qu’ont en commun Bocuse, Rostropovitch, Chirac, Nixon, Dali ou Gault ? Tous aiment ou ont aimé le vin avec passion et tous et bien d’autres encore sont présents dans cet abécédaire où chaque mot se déguste.

Le Phare de Ré : Qu’est ce qui vous a poussé à écrire cet ouvrage ?
Philippe Bourguignon : L’idée, c’est Bernard Pivot (Bernard Pivot qui signe la préface du livre de Philippe Bourguignon, ndlr) qui me l’a donnée en sortant son Dictionnaire amoureux du vin. Je voulais par ailleurs raconter un parcours de 45 ans de sommelier. Sous la forme d’un abécédaire, cela me semblait plus facile. On choisit un mot, on le décline. Après une conférence que j’animais sur le vin, l’éditeur Glénat qui se trouvait dans la salle est venu me voir et m’a proposé de sortir un livre. J’avais déjà en tête la forme que cela pouvait prendre. Je voulais aussi faire connaître l’univers professionnel du sommelier.

Comment avez-vous procédé?
En fait, au début, je prenais un mot comme tire-bouchon puis je regardais sur Wikipédia. Évidemment, je savais que j’allais y trouver tout un tas d’informations sur le tire-bouchon, mais ce n’était pas ma vision à moi, celle que je souhaitais partager. Il fallait expliquer les mots du sommelier mais autrement, de manière plus humaine, sinon cela n’aurait eu aucun intérêt. D’ailleurs, comme je l’ai écrit, il y a tire-bouchon et tire-bouchon.  Alors j’ai commencé à écrire puis, de fil en aiguille, je me suis rendu compte que j’avais écrit énormément sur beaucoup de mots. Il a donc fallu faire une sélection.

Oui, mais justement, comme vous l’avez dit vous-même, Bernard Pivot a signé le Dictionnaire amoureux du vin il y a quelques années. Votre livre n’est-il pas une “copie” du précédent?
Non, car j’ai aussi été animé par le souhait de transmettre aux futures générations de sommelier, de vulgariser un univers professionnel.
Quand j’ai débuté dans le métier en 1973, les écoles hôtelières ne formaient pas au métier de la sommellerie. À l’époque, le métier consistait souvent à transporter et à rouler les barriques. C’était un métier de caviste plus que de sommelier. Puis le sommelier est monté en grade si l’on peut dire. Il est passé de la cave à la salle. Le métier a évolué en même temps que le monde de la restauration et du vin évoluait. J’aime beaucoup ce qu’écrit Bernard Pivot dans la préface de ce livre. Il décrit le sommelier comme un passeur entre le vigneron et le client. Lui s’est toujours considéré comme un sommelier entre les écrivains et les lecteurs. Nous sommes des passeurs.

Voudriez-vous nous évoquer un mot qui n’est pas dans votre ouvrage et qui vous revient en mémoire, de votre expérience de directeur général de Laurent ?
Le mot sillage. Quand on est directeur général d’un restaurant, on précède les clients pour les conduire à leur table et j’ai évidemment précédé d’illustres personnes dans ce contexte. Et bien, en marchant dans la salle, vous sentez le sentiment que la personne derrière vous laisse dans son sillage : parfois de l’admiration, de la jalousie, de l’envie, de l’hostilité ou encore de la bienveillance